(...) Voyez cependant, dans Kapo, le plan où Riva se suicide, en se jetant sur les barbelés électrifiés ; l'homme qui décide, à ce moment, de faire un travelling-avant pour recadrer le cadavre en contre-plongée, en prenant soin d'inscrire exactement la main levée dans un angle de son cadrage final[11], cet homme n'a droit qu'au plus profond mépris. (...)
(...) Faire un film, c'est donc montrer certaines choses, c'est en même temps, et par la même opération, les montrer d'un certain biais ; ces deux actes étant rigoureusement indissociables. De même qu'il ne peut y avoir d'absolu de la mise en scène, car il n'y a pas de mise en scène dans l'absolu, de même le cinéma ne sera jamais un "langage" : les rapports du signe au signifié n'ont aucun cours ici, et n'aboutissent qu'à d'aussi tristes hérésies que la petite Zazie. Toute approche du fait cinématographique qui entreprend de substituer l'addition à la synthèse, l'analyse à l'unité, nous renvoie aussitôt à une rhétorique d'images qui n'a pas plus à voir avec le fait cinématographique que le dessin industriel avec le fait pictural; (...)
in De L'abjection- Jacques Rivette (1961)
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